Droit de grève: la CGEM veut forcer la main à l’Exécutif

Le360 : Adil Gardouz

Agacée par les grèves qui affaiblissent l'économie nationale et les tergiversations de l'Exécutif à déposer un projet de loi organique sur le droit de grève, la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) veut forcer les choses en déposant sa propre proposition.

Le 01/02/2016 à 20h35

Il faut d'abord signaler que la Constitution précise dans ses dispositions que les projets de lois organiques relèvent de l'attribution et de la compétence exclusives du gouvernement, alors que les propositions de lois sont l'œuvre des députés, des conseillers de la deuxième Chambre, ainsi que de tout citoyen aspirant à contribuer à la promotion de la vie législative.

Selon des sources parlementaires, le fait que la CGEM se soit rapidement lancée dans le dépôt, le 26 janvier, de sa proposition de loi organique sur le droit de grève, vise à contraindre Abdelillah Benkirane à réagir vite et à accélérer l'adoption en Conseil de gouvernement d’un projet de loi organique sur le droit de grève.

"Devant le Parlement, tout projet de loi organique du gouvernement est examiné et voté en priorité par rapport à toute proposition de loi. Le texte de la CGEM sera donc déclassé et ne servira qu'à enrichir le débat pour renforcer et amender le projet de loi organique de Abdelillah Benkirane", selon les mêmes sources.

La CGEM estime que "fidèle à sa dynamique de force de proposition, la Confédération, à la demande expresse de sa présidente, Miriem Bensalah Chaqroun, a déposé le 26 janvier 2016, via son groupe parlementaire à la Chambre des conseillers, une proposition de loi organique relative aux conditions et modalités d’exercice du droit de grève. Un texte qui se veut "équilibré et conforme" aux conventions internationales et aux lois en vigueur, Le Maroc reconnaît le droit de grève depuis sa Constitution des années 60, mais jamais depuis lors une loi organique n'est venue déterminer les conditions de l'application de ce droit de grève».

Selon la CGEM, la proposition de loi a pour principale finalité la définition du concept de grève, jusque-là non-règlementé, et les conditions qui lui sont associées. Basé sur le principe que la grève représente un dernier recours, le texte élaboré par la CGEM devrait donner plus de place à la négociation préalable et renforcer davantage le rôle des syndicats. Ces derniers, trop longtemps hostiles à la réglementation de ce droit de grève, estiment que le texte "limite la liberté syndicale au profit du capital".

Contacté par Le360, un dirigeant de la CGEM a indiqué que durant les neuf premiers mois de 2015, le patronat a enregistré la perte de 193.000 jours d'emplois, soit 21% de plus par rapport à 2014.

"L'année 2015 à été une période record de perte de journées d'emploi pour les entreprises à cause des grèves sauvages", selon ce dirigeant de la CGEM. "Les grèves ont baissé en termes de nombre mais se sont aggravées en termes de durée", a-t-il ajouté en précisant que les syndicalistes ne doivent pas oublier que "tout point de croissance permet la création de 25.000 emplois".

Or, a-t-il regretté, en 2015, près de 8.500 Petites et moyennes entreprises ont fait faillite à cause des grèves sauvages.

Contacté par Le360, le Chef de gouvernement, Abdelillah Benkirane, a assuré qu'il présentera dans les prochaines semaines au Parlement son projet de loi organique sur le droit de grève. Le ministre de l'Emploi, Abdesslam Seddiki (PPS), a rappelé pour sa part que la Constitution exige l'adoption de ce texte organique avant la fin de cette législature. "Notre économie a besoin de cette loi, la première du genre en Afrique", a-t-il souligné.

Par Mohamed Chakir Alaoui
Le 01/02/2016 à 20h35