Sénégal: la perpétuité requise contre Hissein Habré

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Dans son réquisitoire, Mbacké Fall, le procureur général près les Chambres africaines extraordinaires (CAE), a requis la perpétuité contre Hissein Habré et la confiscation de ses biens. La défense de ce dernier entre en danse aujourd’hui.

Le 11/02/2016 à 17h59

Dans un réquisitoire sans concession, Mbacké Fall, le procureur général près les Chambres africaines extraordinaires (CAE), a requis, hier, la peine de prison à perpétuité contre Hissein Habré, l’ex-président tchadien, et la confiscation de tous ses biens.

«La responsabilité de Habré doit être retenue pour les chefs d’accusation de tortures, crimes autonomes, crimes contre l’humanité et crimes de guerre», a estimé le parquetier.

Dans un document de 210 pages, le maître des poursuites a tenté d’asseoir la culpabilité de Habré, n’accordant «aucune circonstance atténuante» à l’ancien homme fort de N’Djamena qui, «face aux témoignages des victimes a répondu par le silence» et n’a eu «aucun mot de repenti, aucun regret».

Dans un discours mêlant références coraniques et rappels historiques, Mbacké Fall a accusé Hissein Habré d’avoir «désarticulé le Tchad par son pouvoir exorbitant».

Il décrit les prisons de la fameuse DDS (Direction de la documentation et de la sécurité, police politique du régime et principal instrument de répression du régime), «directement subordonnée à la présidence en raison du caractère confidentiel de ses activités», comme «de grands lieux de criminalité jamais connus dans l’histoire de l’humanité», des «mouroirs» où se pratiquaient «des exactions de masse». Et le donneur d’ordre n’était autre que Habré, à ses yeux.

Pour Mbacké Fall, les conséquences de ces crimes étaient «désastreuses» à l’endroit des populations et des ennemis de Habré. «La torture était systématiquement utilisée», soutient-il.

Des accusations que tenteront de balayer les avocats commis d’office pour la défense, qui entrent en scène aujourd’hui. Les autres avocats de Habré, les «vrais» (ceux qu’il s’était choisi lui-même avant de les interdire de le représenter durant le procès conformément à sa stratégie de boycott) avaient, eux, déjà dit tout ce qu’ils pensaient de ce procès.

«Une mascarade judiciaire» où la procédure d’instruction et celle d’audience, «toutes parfaitement inéquitables et iniques, n’ont laissé aucune place pour la conduite d’une défense respectueuse des droits de l’accusé et de ses avocats», d’après les termes de Me François Serres, qui a choisi de plaider dans la presse plutôt dans un tribunal auquel leur client dénie toute crédibilité.

Ayant dirigé le Tchad entre 1982 et 1990, Hissein Habré est jugé depuis le 20 juillet 2015 devant les CAE, à Dakar, pour «crimes de guerre, crimes contre l’humanité et tortures». Le verdict est attendu en juin 2016.

Par Ibrahima Diallo
Le 11/02/2016 à 17h59