Portrait: Moubarak, le raïs déchu et libre

Hosni Moubarak couché sur une civière lors de son procès. 

Hosni Moubarak couché sur une civière lors de son procès.  . DR

Hosni Moubarak, libéré vendredi 24 mars, a été le maître absolu de l'Egypte durant trois décennies avant d'être renversé en 2011 par un soulèvement populaire.

Le 24/03/2017 à 10h58

Agé de 88 ans, M. Moubarak avait été emporté dans le tumulte du Printemps arabe le 11 février 2011.

Depuis cette sortie fracassante qui avait entraîné un effet domino dans le reste du Moyen-Orient, l'ancien raïs a passé le plus clair de son temps dans un hôpital militaire du Caire.

Les rares images de lui l'ont montré diminué, apparaissant au balcon de cet hôpital du quartier cossu de Maadi.

Cet ancien commandant en chef de l'armée de l'air, réputé pragmatique, mais de plus en plus coupé du peuple et orgueilleux, avait forgé un redoutable appareil répressif pour régner sans partage sur l'Egypte.

Or après la révolution, l'ex-raïs a été soumis à un véritable marathon judiciaire, riche en rebondissements.

Son premier procès s'était ouvert dès août 2011, pour complicité dans le meurtre de centaines de manifestants durant la révolte de 2011: près de 850 personnes avaient été tuées dans la répression du soulèvement.

Condamné en juin 2012 en première instance à la prison à vie, il a ensuite bénéficié de l'abandon des charges pesant contre lui. Avant d'être acquitté définitivement début mars.

M. Moubarak a également été condamné à trois ans de prison dans une affaire de corruption, au côté de ses deux fils Alaa et Gamal, ce dernier ayant été longtemps pressenti pour prendre sa succession à la tête de l'Egypte. Tous deux avaient été remis en liberté.

Né le 4 mai 1928 dans une famille de la petite bourgeoisie rurale du delta du Nil, Hosni Moubarak devient pilote de chasse et gravit tous les échelons de l'armée de l'air égyptienne, jusqu'à en devenir commandant en chef.

Après la guerre du Kippour en 1973, son rang lui permet d'entamer une carrière politique.

Nommé vice-président en 1975 par le président Anouar al-Sadate, il est au côté du chef de l'Etat quand ce dernier est assassiné par des jihadistes en 1981, lors d'un défilé militaire au Caire. Légèrement blessé, il devient président quelques jours plus tard.

Comparé à ses prédécesseurs -le très charismatique Gamal Abdel Nasser et le rusé politicien Sadate- il fait pâle figure et hérite du surnom de "vache qui rit", pour sa ressemblance supposée avec la célèbre mascotte du fromage français.

Le maintien des accords de paix de 1979 avec Israël et sa réputation de "modéré" au sein du monde arabe lui ont valu les faveurs de l'Occident, en particulier des Etats-Unis, dont il est resté un allié indéfectible.

Avec sa silhouette trapue, sa chevelure toujours drue malgré l'âge et son regard souvent dissimulé derrière des lunettes de soleil, il était devenu une figure familière des réunions internationales.

Sur le plan intérieur, l'amorce de décollage économique dans les dernières années de son règne a été accompagnée d'une aggravation des inégalités, du mécontentement social et de la corruption.

Parallèlement, M. Moubarak s'est montré un adversaire résolu des jihadistes d'Al-Qaïda mais aussi des Frères musulmans, sans toutefois parvenir à enrayer la popularité de la confrérie conservatrice.

Chef d'Etat égyptien resté le plus longtemps au pouvoir depuis l'abolition de la monarchie en 1953, il a maintenu en permanence l'état d'urgence, échappant à plusieurs tentatives d'assassinat.

La santé de M. Moubarak a été l'objet depuis sa chute d'incessantes spéculations faisant état tour à tour de dépression aiguë, de cancer, d'accident cardiaque ou de problèmes respiratoires.

Il a comparu aux audiences de ses procès assis sur une civière, assurant derrière ses lunettes de soleil avoir "la conscience tranquille".

Le 24/03/2017 à 10h58