Diapo-Vidéos. Tunisie: troubles nocturnes quelques jours après les dix ans de la révolution, l’armée déployée

L'armée est intervenue à Ettadhamen, dans la soirée du 17 janvier 2021, après des heurts dans cette banlieue au nord-ouest de Tunis. 

L'armée est intervenue à Ettadhamen, dans la soirée du 17 janvier 2021, après des heurts dans cette banlieue au nord-ouest de Tunis.  . FETHI BELAID / AFP

Le 18/01/2021 à 06h43

VidéoJets de pierres contre tirs de gaz lacrymogènes: à Ettadhamen, quartier populaire en périphérie de Tunis, comme dans plusieurs autres villes, de nouveaux troubles nocturnes ont éclaté hier, dimanche, en dépit d'un confinement sanitaire, quelques jours après le dixième anniversaire de la révolution du Jasmin.

Le porte-parole du ministère tunisien de la Défense, Mohamed Zekri, a annoncé hier soir, dimanche 17 janvier 2021 que des unités militaires ont été dépêchées dans plusieurs provinces du pays, pour assister les forces de sécurité à contenir les manifestations nocturnes qui se sont considérablement développées depuis deux jours dans plusieurs régions du pays.

Dans un communiqué cité par l'agence TAP, Mohamed Zekri a déclaré que les unités militaires ont renforcé leur présence dans quatre provinces à savoir Sousse (côte-est), Kasserine (centre-ouest), Bizerte (extrême-nord) et Siliana (nord-ouest) afin de protéger les institutions de souveraineté.

Le responsable tunisien a ajouté que "ce renforcement sécuritaire a été décidé en premier lieu par la nécessité de protéger les quartiers généraux des établissements souverains dans ces quatre provinces, à la lumière de l'évolution de la situation due aux émeutes et aux actes de saccage dans un certain nombre de régions".

Cette décision intervient alors que la plupart des provinces du pays, dont Tunis, Ariana, Siliana, Bizerte, Monastir, Manouba, Nabeul, Kairouan, Sidi Bouzid, Kasserine, Gafsa et Sousse, sont en proie à de violentes manifestations populaires nocturnes pour le troisième jour consécutif, marquées par des affrontements entre les forces de sécurité et des jeunes ayant délibérément fermé des routes et jetant des pierres ainsi que d'autres projectiles contre les forces de l'ordre.

Certains manifestants dans plusieurs villes ont pris d'assaut des supermarchés avant de se livrer à un pillage en règle. Ils ont également tenté de brûler un centre de sécurité, un entrepôt municipal, une succursale bancaire ainsi que d'autres propriétés privées et publiques, toujours selon l'agence de presse tunisienne. A noter que ces manifestations nocturnes ont éclaté alors que les autorités tunisiennes ont imposé un couvre-feu de 16H00 à 06H00 (15H00 à 05H00 GMT) pour briser la propagation rapide du nouveau coronavirus.

Des dizaines de jeunes, en majorité des mineurs âgés de 14 à 17 ans, ont été arrêtés après des heurts ces trois derniers jours, a indiqué hier dimanche à l'AFP Khaled Hayouni, porte-parole du ministère de l'Intérieur, quelques jours après le dixième anniversaire de la chute du président Zine El Abidine Ben Ali et de son régime policier.

Si cet anniversaire a été étouffé par un confinement général de quatre jours qui s'est achevé hier, dimanche, pour tenter d'endiguer une flambée de cas de Covid-19, il n'a toutefois pas empêché les troubles, dont les motifs exacts ne sont pas connus.

Ces heurts interviennent dans un contexte d'instabilité politique et de dégradation de la situation sociale en Tunisie.

Dans les rues, des adolescents remplissent leurs poches de pierres. "C'est pour les ennemis", lance joyeusement l'un d'eux en allusion aux agents de la police.

Le son des sirènes hurlantes ne couvre pas celui des explosions des feux d'artifices jetés depuis des toits de maisons, d'où des jeunes visaient dès la nuit tombée, à coups de pierres, un important dispositif de police et de la garde nationale (gendarmerie).

"Rentrez chez vous!", lance avec un haut-parleur l'un des gendarmes, au moment où les forces de sécurité tiraient massivement des gaz lacrymogènes pour disperser les groupes présents.

Très vives entre les différents partis composant un Parlement fragmenté depuis les élections de 2019, les tensions fragilisent le gouvernement largement remanié samedi et en attente d'un vote de confiance.

Les divisions paralysent le pays au moment où l'urgence sociale s'accentue avec la pandémie de nouveau coronavirus (177.231 cas, dont 5.616 décès), qui ajoute la hausse du chômage à celle des prix et met en évidence la défaillance des services publics.

Le mois de janvier est régulièrement le théâtre de mobilisations en Tunisie, car cette période marque l'anniversaire de plusieurs luttes sociales et démocratiques majeures.

Mais ici, "il ne s'agit pas de mouvements de protestation, ce sont des jeunes qui viennent de quartiers proches pour voler et s'amuser", estime Oussama, 26 ans, un habitant d'Ettadhamen. "Si on proteste, ça sera la journée et à visage découvert."

Ces derniers jours, des heurts ont eu lieu dans plusieurs quartiers populaires notamment à Tunis, Bizerte, Menzel Bourguiba (nord), Sousse et Nabeul (est), Kasserine et Siliana (nord-ouest), selon des correspondants de l'AFP et des vidéos publiées sur internet par des habitants.

Celles-ci montraient des jeunes dans plusieurs villes brûlant des pneus, insultant la police ou pillant des commerces.

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Sur les réseaux sociaux, certains Tunisiens attribuaient ces violences à l'échec de la classe politique à améliorer la situation, d'autres accusaient des parties d'instrumentaliser ces troubles pour "créer le chaos".

Le 18/01/2021 à 06h43