Vidéo. Polémique: à la télé française, un médecin assimile le crachat à un rituel musulman lié au ramadan

Le professeur Pascal Ascagneau sur le plateau de Morandini Live.

Le professeur Pascal Ascagneau sur le plateau de Morandini Live. . DR

Interrogé sur les dangers liés au fait de cracher dans la rue en temps de pandémie de Covid-19, un professeur de l’hôpital de la Pitié-Salpétrière a manqué une occasion de se taire en pointant du doigt une tradition qui serait, selon lui, musulmane.

Le 12/05/2020 à 12h36

Invité hier, lundi 11 mai, de l’émission Morandini Live sur CNN, le professeur Pascal Astagneau, infectiologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris), a répondu à une question liée aux méfaits du crachat en temps d’épidémie de Covid-19, en établissant un lien étrange entre le fait de cracher et une pseudo-tradition religieuse musulmane.

De quoi provoquer une vive polémique du côté de la communauté musulmane de France, échaudée par les amalgames et les contre-vérités qui s’invitent un peu trop souvent dans les médias de l’hexagone.

«Est-ce que cracher dans la rue, c’est dangereux pour les autres?», interroge la journaliste sur le plateau de Jean-Marc Morandini. Une question à laquelle s’attelle le Professeur Pascal Astagneau. «Oui, d’une façon générale. Bien sûr qu’il ne faut pas cracher dans la rue, surtout pas sur son voisin. C’est vraiment quelque chose qu’on évite de faire, a-t-il d’abord répondu avant de déraper dangereusement. Alors bien sûr, il y a des histoires liées à des rites religieux, au Ramadan par exemple… Des choses comme ça qui font que des gens… » 

Ledit professeur n’a pas eu le temps d’exposer plus amplement le fond de sa pensée car Jean-Marc Morandini, visiblement gêné, l’a interrompu dans son envolée, en cherchant à recadrer le débat. «Non mais par exemple il y a des sportifs que le font», a ainsi rétorqué le journaliste, qui poursuit: «on voit beaucoup de gens courir, qui au bout d’un moment crachent… ».

Mais trop tard, le mal est fait… Sur les réseaux sociaux, les internautes n’ont pas manqué d’exprimer leur colère et de reprocher par la même occasion à Jean-Marc Morandini de ne pas avoir repris son invité, en se désolidarisant de ses propos.

«Non Professeur Astagneau! Nous ne crachons pas dehors pendant le Ramadan, c'est quoi comme bêtise encore?», a par ailleurs tweeté un internaute parmi les nombreux autres qui ont réagi à ces propos.

La Toile n’a pas été la seule à réagir vivement à ces propos indécents.

De son côté, Abdellah Zekri, le président de l’Observatoire national de lutte contre l’islamophobie et Délégué général du CFCM, le Conseil français du culte musulman, s’est fendu d’un communiqué de presse dans lequel celui-ci juge «regrettable qu’une assertion aussi grotesque émane d’un membre de la communauté scientifique dont le propos est perçu par le plus grand nombre comme une vérité irréfragable et une connaissance certaine et indubitable».

Abdellah Zekri poursuit en jugeant que «cette contrevérité, qu’elle soit préméditée ou qu’elle résulte d’une indigence intellectuelle, est une provocation de trop qui non seulement décrédibilise son auteur mais, plus grave, ajoute au sentiment d’islamophobie ambiante et conforte la communauté musulmane dans sa conviction que des forces malintentionnées œuvrent à anathématiser une catégorie de la société à des fins inavouées».

Et à en croire ce communiqué de presse, l’affaire n’en restera pas là. Le professeur Pascal Astagneau est non seulement «tenu de présenter des excuses publiques pour ce énième opprobre qui, par sa récurrence maladive, devient, lui, proprement rituel», exige-t-on ainsi avant d’annoncer que «le Président de l’Observatoire National de Lutte contre l’Islamophobie du C.F.C.M., via son avocate Me Aoudia, a saisi le C.S.A. et se réserve tous les droits d’agir pour faire sanctionner par les voies légales ces propos indignes qui ont scandalisé et heurté les musulmans de France et appelle la chaîne à prendre ses responsabilités et présenter ses excuses aux millions de musulmans blessés par des propos irresponsables de ce médecin».

Une chose est sûre, on a beau être médecin, on n’en demeure pas moins ignorant sur certaines questions, notamment à teneur religieuse.

Par Zineb Ibnouzahir
Le 12/05/2020 à 12h36