Relance économique: les nouvelles mesures restrictives vont peser sur la croissance

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Le renforcement des mesures sanitaires décrétées par le gouvernement en début de semaine pourrait coûter à la croissance marocaine quelques dizaines de points de PIB. Les entreprises les plus fragiles, en particulier dans le secteur de la restauration et du tourisme, y laisseront des plumes.

Le 24/12/2020 à 16h41

L’imprévisibilité de l’évolution de la situation épidémiologique liée à la pandémie de coronavirus met à rude épreuve les nerfs des opérateurs économiques. Alors que les annonces sur les vaccins avaient suscité un regain d’optimisme chez les chefs d’entreprises, ces dernières semaines, les mesures restrictives annoncées par le gouvernement, lundi 21 décembre, pour endiguer la propagation du virus ont distillé, à nouveau, le doute auprès des opérateurs économiques.

«Nous avons cru à un moment que le plus dur était derrière nous. Mais ce mini-confinement nous rappelle que c’est loin d’être le cas», confie un chef d'entreprise.

Le renforcement des mesures sanitaires sur tout le territoire national, en particulier la fermeture totale des restaurants dans 4 villes (Marrakech, Agadir, Tanger et Casablanca) pendant trois semaines et les restrictions de déplacement, ne seront pas sans impacts sur la vigueur de la relance économique.

«Les implications directes imputables à tout arrêt d’activité peuvent atteindre des niveaux formidables. Nous avons tous encore en tête le milliard de dirhams perdu par jour de confinement évoqué par le ministre des Finances Mohamed Benchaâboun, il y a de cela quelques mois, certes dans un contexte de confinement total», souligne Hicham Alaoui Bensaid, directeur général d’Euler Hermes Acmar, filiale marocaine du groupe Euler Hermes.

Dans un tel contexte emprunt d’autant d’incertitudes, il est difficile pour les opérateurs de se projeter vers l’avenir. «Sans un minimum de facultés d’anticipation offertes aux chefs d’entreprises, des décisions stratégiques, comme le recrutement ou les investissements, risquent d’être différées, impactant, de ce fait, négativement la relance économique dans sa globalité», analyse Alaoui Bensaid.

Parmi les différents secteurs, ceux en lien avec la restauration seront évidemment les plus touchés par ces nouvelles restrictions, sans oublier les opérateurs touristiques, qui ont définitivement mis une croix sur leur espoir de profiter des fêtes de fin d’année pour se refaire une santé financière, après une année 2020 cauchemardesque.

«En toute cohérence, les acteurs directs de la chaine de valeur touristique, comme les restaurants, les hôtels, les transporteurs, les prestataires de services divers, etc.» devraient être, dans un premier temps, les plus impactés, avant de potentiellement atteindre d’autres pans d’activité moins directs comme les fournisseurs d’infrastructures, les sociétés d’interim, etc.», affirme notre interlocuteur.

Une situation qui pourrait être fatale pour les entreprises les plus fragiles. «Si certaines de ces entreprises risquent de souffrir ponctuellement, il est à craindre malheureusement que d’autres n’y voient là leur coup de grâce», estime Alaoui Bensaid, surtout si, ajoute-t-il, «une certaine forme de lassitude, voire de fatalisme, s’instille chez certains chefs d’entreprises».

Dans ce contexte, une hausse des défaillances d'entreprises dans ce contexte n’est pas à exclure. Les anticipations d’Euler Hermes font état, à horizon 2022, d’une croissance de l’ordre de 25% des défaillances d’entreprises comparativement à 2020.

D’ailleurs, juste après l’annonce des nouvelles mesures sanitaires par les autorités, la Confédération marocaine des métiers de bouche (CMMB) a interpellé le gouvernement sur la situation désespérée de certains restaurateurs, et sur le caractère «mortel» de cette décision pour plusieurs professionnels. «30% des commerces ont été contraints à la fermeture et à la cessation d’activité. Le reste arrivera à suffocation avec une telle décision de fermeture définitive pendant trois semaines», a alerté le CMMB.

A noter qu’hier, mercredi 24 novembre, le Fonds monétaire international (FMI) a, une fois de plus, revu à la baisse la croissance de l’économie marocaine en 2020 et 2021. Pour l’année qui s’achève, l’institution de Bretton Woods table désormais sur une récession de -7,2% (au lieu de -7% pronostiqué en octobre dernier).

Pour 2021, le rebond du PIB devait être moins prononcé qu’espéré. Le taux de croissance l’année prochaine devrait s’établir à 4,5%, au lieu des 4,9% prévus en octobre dernier.

Par Amine El Kadiri
Le 24/12/2020 à 16h41