Les six maux chroniques du secteur de la promotion immobilière

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Bien qu'elle constitue un secteur très lucratif, la promotion immobilière souffre de nombreux de maux et se trouve ralentie dans son développement par de multiples contraintes. En voici les principales.

Le 09/01/2017 à 11h38

Certes, le secteur de la promotion immobilière s’avère souvent être très lucratif pour les investisseurs. Cependant, au-delà des idées reçues, l'activité est minée par une série de maux chroniques qui doivent être traités afin de permettre au secteur de demeurer une locomotive pour le développement socio-économique du pays.

La note d’information relative à l’emprunt obligataire lancé par Immolog, filiale commune d’Addoha et de la Compagnie générale immobilière (CGI), a le mérite de lever le voile sur les principales contraintes qui entravent ce développement.

La première concerne ce déséquilibre profond entre l’offre et la demande qui pénalise, à la fois les promoteurs, mais aussi les citoyens. De plus, il semble que ce déséquilibre tend à se pérenniser.

Dans cette note, il est en effet expliqué que ce déséquilibre majeur entre l’offre et la demande, en termes de logement, est une conséquence de la rapidité de la croissance urbaine et de la poussée de l’exode rural. Ce constat est accentué par de nombreuses contraintes qui freinent le développement du secteur, notamment la faiblesse de l’offre foncière mobilisable pour des projets immobiliers.

En effet, nul n’ignore que l'acquisition du foncier à des prix abordables est l'un des facteurs essentiels de la réussite de n’importe quel promoteur immobilier. Or, la rareté des terrains mobilisables constitue un frein essentiel au développement du secteur de l’immobilier au Maroc et, principalement, dans les grandes villes où, paradoxalement, la demande est importante.

«Comparée à l’offre théorique de terrain à bâtir, selon les plans d’aménagement, l’offre réelle est très réduite et les terrains effectivement mobilisables sont rares (excluant les terrains non immatriculés, non desservis, destinés à l’équipement et aux infrastructures etc.)», est-il précisé dans la note d’information.

Cette situation contribue inéluctablement à la surenchère des prix du foncier et, par conséquent, au prix final des logements.

Des procédures administratives compliquées

L’autre élément présenté comme un frein au développement du secteur de la promotion immobilière par les professionnels est celui des procédures administratives.

Les procédures régissant le secteur de l’immobilier contribuent, en effet, à l’extension des délais de production des logements, ainsi que des délais de délivrance des permis de construire, pouvant ralentir ainsi la réalisation des projets et entraîner, in fine, une hausse des prix du mètre carré loti.

Toutefois, la note d’information d’Immolog précise que des mesures transitoires ont été mises en place dans un souci de simplification de ces procédures.

Autrefois considéré comme principal facteur de la dynamique du secteur immobilier, le secteur locatif est devenu, ces dernières décennies, un autre obstacle à la promotion immobilière en raison de la récession dans laquelle il s’est installé.

Cette situation est principalement due à la détérioration des relations entre les propriétaires et les locataires, à l'inadaptation de la législation relative au secteur locatif qui se caractérise par la complexité et la lenteur de sa procédure et à l’absence de mesures d’incitation à l’investissement dans le secteur locatif.

Du coup, au lieu d’être un relais de croissance pour le secteur de l’immobilier, le locatif n’a plus qu’un impact mineur, si ce n’est nul, sur la promotion immobilière.

Dans la note d’information d’Immolog il est souligné qu’une révision de la loi sur le locatif a été effectuée il y a quelques années en vue d’améliorer les rapports entre bailleurs et locataires. Cependant, des incitations, notamment fiscales, devraient être mises en place afin de relancer ce secteur qui satisfait les besoins de plus de 35% des ménages urbains.

Sous-qualification de la main d'oeuvre

Sur un tout autre registre, les professionnels de l’immobilier présentent aussi la sous-qualification de la main d’œuvre comme l'un des freins au développement du secteur. En effet, le taux d’encadrement dans le secteur du BTP est parmi les plus faibles des différents secteurs de l’économie nationale. Un besoin de formation important s’y fait sentir et conditionne les gains de productivité recherchés dans le secteur.

Sur le plan de la qualification des effectifs, le secteur du BTP fait largement appel à une main d’œuvre non ou très peu qualifiée. En tout, plus des deux tiers des employés du secteur n’ont aucun niveau de scolarité, ce qui n’est pas sans conséquence sur la qualité des travaux dans les chantiers.

Enfin, comme beaucoup d’autres secteurs de l’économie nationale, celui de l’immobilier souffre également de l’informel. Le secteur de la production de logements est marqué par le poids important des unités informelles. Les seules données disponibles sur ce sujet émanent d’une étude du ministère de l’Habitat et de l’urbanisme sur la situation du marché en l’an 2000.

Les unités informelles représentaient près de 90% de l’ensemble des acteurs et réalisaient près de 80% de la production. Les unités de production organisées étaient concentrées en grande partie dans l’axe Rabat-Casablanca qui regroupait 30% des unités. Plus de la moitié des entreprises du secteur organisé (54,3%) ont été créées après 1990 et 54% réalisaient un chiffre d’affaires de moins de 5 millions de dirhams.

Un autre phénomène persistant au Maroc et pénalisant pour le secteur est le paiement au «noir», une pratique très courante dans le pays. Outre son impact négatif sur la collecte des revenus fiscaux de l’Etat, cette pratique a pour effet de biaiser les prix du marché et d’alimenter leur inflation d’année en année, pénalisant un nombre important de ménages désirant accéder à la propriété.

Par Younès Tantaoui
Le 09/01/2017 à 11h38