La connexion émiratie brouille Maroc Telecom

Siège de Maroc Telecom à Rabat.

Siège de Maroc Telecom à Rabat. . DR

Retard dans le lancement de la 4G, faible contribution des filiales africaines, perte de parts de marché sur le marché domestique… Les places financières ont toutes les raisons pour sanctionner le titre Maroc Telecom. Analyse.

Le 15/06/2015 à 19h13

Jamais le titre Itissalat Al-Maghrib (IAM) n’a été aussi malmené dans les salles de marché! Sur la corbeille casablancaise, la première capitalisation boursière a déjà perdu tous ses gains au terme d’une dizaine de séances. Elle cote à la clôture de la séance du lundi 15 juin à 108,5 dirhams, soit un niveau similaire à celui de septembre dernier. Sur la Bourse de Paris, le décrochage est encore plus brutal. Le titre IAM est revenu à son plus bas cours depuis juillet dernier. Et en valorisation, le titre a cédé plus de 2,1 milliards d’euros depuis mars dernier. Mirobolant!

Des misères africaines ?

Pourtant, Maroc Telecom a démarré l’année sur les chapeaux de roue. Les investisseurs surfaient sur les retombées du rachat des filiales africaines détenues jusque-là par sa maison-mère, l’Emirati Etissalat. Mais l’opération, qui promettait une importante consolidation de la position africaine de Maroc Telecom (comptant déjà plusieurs antennes dans le continent), s’est avéré être un cadeau empoisonné, ou du moins un «agal» trop lourd à porter. Au-delà de la coquette somme de 472 millions d’euros remontés aux Emiratis pour le rachat de ces six nouvelles filiales en Afrique, les transactions se sont avérées dans certains pays beaucoup plus compliquées que prévu. Et même après avoir finalisé l’opération, l’impact sur les indicateurs financiers est resté assez limité.

La communauté des analystes entre Paris et Casablanca a déchanté quand ont été rendus publics, en avril dernier, les premiers comptes consolidés après cette nouvelle extension du réseau africain. Les six nouvelles filiales ont, certes, apporté un milliard d’euros supplémentaires au chiffre d’affaires de l’activité internationale de Maroc Telecom (soit à peine la moitié des filiales historiques), mais ont néanmoins produit une détérioration de la marge du résultat opérationnel de 3,6 points. Sur chaque 100 dirhams de chiffre d’affaires, les filiales africaines ne rapportent plus que 24 dirhams contre 27,6 dirhams durant le 1er trimestre 2015. Il va donc bien falloir du temps à Maroc Telecom pour digérer et mettre sur orbite ses nouvelles acquisitions africaines.

Baisse de régime sur le marché domestique

Sur son marché domestique, Maroc Telecom n’est plus non plus au top de sa forme. Quasiment tous les indicateurs sont en recul, sauf en ce qui concerne le marché du fixe dans lequel l’opérateur historique continue de brouiller les règles de la concurrence malgré les récentes décisions du régulateur qui cherche à démanteler définitivement le monopole. Sur le segment du mobile, IAM fait de la promo sans compter, quitte à voir son ARPU (revenu moyen par utilisateur) fondre de 7%.

Pis encore, Maroc Telecom donne l’impression qu’elle ne fait que défendre sa position hégémonique et semble avoir définitivement abandonné le terrain de l’innovation pour tenter de contrer des challengers de plus en plus compétitifs et réactifs. Dernier exemple en date: l’opérateur a été pris de vitesse par ses concurrents pour le lancement de la 4G. Un train de retard que l'opérateur risque de payer assez cher en matière de revenus futurs sur ce segment d’avenir et que le marché boursier sanctionne déjà.La séance du mardi 9 juin a été désastreuse pour le titre IAM, à Casablanca, comme à Paris avec des pertes d’environ 6%. Et encore, l’opérateur mobilise énormément d’argent pour réguler son cours à travers un programme de rachat de ses propres actions…

Par Fahd Iraqi
Le 15/06/2015 à 19h13