Vidéo. Quand Majida Khattari parodie Jeff Koons

Le360 : Adil Gadrouz

La plasticienne marocaine Majida Khattari parodie l’artiste américain Jeff Koons. Elle crée la «MK disaster collection» en réponse à la «Masters collection» que l'Américain a créé pour Luis Vuitton. Un exercice sans complaisance où la férocité du regard questionne l'essence même d'une oeuvre d'art.

Le 15/06/2017 à 13h21

Le plasticien américain Jeff Koons a créé «Masters Collection» pour Luis Vuitton. Une collection de sacs de luxe sur lesquels sont gravés les oeuvres des grands noms de la peinture classique, à l'instar de Leonard Da Vinci et Pierre Paul Rubens.

Jeff Koons présentant la "Master collection"

interpelée par la vidéo de Jeff Koons qui fait la promotions des sacs Luis Vuitton, Majida Khattari a parodié point par point l'intervention de l'Américain, en créant d'autres sacs qui portent des images autrement moins glamour. Elle a intitulé sa collection de sacs «Mk disaster collection».

Majida Khattari présentant «MK disaster collection»

La plasticienne marocaine a toujours travaillé sur la question du lien entre la mode et la société, le luxe et l’art depuis plus de 20 ans. Elle s’inspire cette fois-ci de la Masters Collection de Jeff Koons et crée une vidéo-performance, histoire de nous interroger sur l’influence de l’univers de la mode et du luxe sur notre perception du monde.

La vidéo-performance «Disaster Collection» est une réponse à la vidéo de communication réalisée par Luis Vuitton et Jeff Koons pour annoncer la «Masters Collection».

Après le succès de ses performances «Luxe, Oil & Arrogance» et «Marchand Migrant», pour lesquelles elle a déjà créé des sacs «Killy», en hommage au «Kelly bag» de Hermès, Majida Khattari revient au lien entre cet accessoire de luxe et l'engagement politique.

«Je tiens à souligner en créant cette collection, jusqu'à quel point notre désir de consommer nous fait oublier la politique», déclare Majida Khattari.

L’objectif premier de cette artiste est de rétablir une connexion entre les uns et les autres. «En apercevant ces sacs dans la rue, on devrait arriver à sentir ne serait-ce qu’émotionnellement une interaction avec l’autre».

En toile de fond de ses sacs, des images de conflits pour attirer notre attention sur les victimes : la guerre en Syrie, la destruction du patrimoine culturel, les attentats terroristes à Istanbul, Paris, Manchester, les réfugiés et leur calvaire européen.

Majida Khattari se sert de la mode, du luxe, pour y imprimer l’une des faces les plus sombres de l’actualité ainsi que la capacité des hommes à produire le pire. Sa cruelle parodie de Jeff Koons dépasse l’exercice pour atteindre un statut troublant, celui de la dénonciation de ce triangle réservé à une petite catégorie d’hommes : communication, luxe et art. L’interpénétration entre ces trois composantes ne permet plus de savoir si l’art garde toujours une ascendance hiérarchique dans l’art contemporain. Tout en parodiant Jeff Koons, Majida Khattari tire vers le bas, vers le réel le triangle que forment communication, luxe et art. Et son œuvre n’en est que plus insupportable. Insupportablement contemporaine. 

Par Qods Chabaa
Le 15/06/2017 à 13h21