Vidéo. Chine: voici pourquoi les comédies musicales françaises ont tant le vent en poupe

L'affiche de la comédie musicale adaptée du roman publié par Stendhal au XIXe, d'abord jouée à Paris. 

L'affiche de la comédie musicale adaptée du roman publié par Stendhal au XIXe, d'abord jouée à Paris.  . DR

Le 08/11/2019 à 09h01

VidéoElles ont d’abord conquis la France, et sont ensuite devenues incontournables en Chine. Les comédies musicales françaises s'offrent une seconde jeunesse auprès du public chinois, avide de divertissement et familier des grands classiques tricolores.

"Roméo et Juliette", "Notre-Dame de Paris", "Mozart, l'opéra rock" ou encore "Le Rouge et le Noir": ces spectacles, adaptés de classiques de la littérature ou célébrant des personnages historiques, rencontrent un immense succès dans le pays, en particulier auprès des jeunes femmes.

En 2018, 2.460 comédies musicales ont été jouées en Chine pour 1,6 million de spectateurs, selon des chiffres du secteur en constante progression.

"En Chine, il y a une vraie culture du «musical», plus qu'en France bizarrement", assure Laurent Bàn, qui interprète Monsieur Valenod, le méchant du "Rouge et le Noir".

Le spectacle, qui revisite en opéra rock l'œuvre de Stendhal, est à l'affiche depuis début octobre pour 50 dates à travers la Chine. Et la plupart sont complètes malgré le prix élevé des places -jusqu'à 1.180 yuans (150 euros), soit plus que le salaire minimum dans les provinces les moins développées.

Mais ce n'est pas un frein pour Su Dewei, 45 ans, et sa femme, venus assister à une représentation à Pékin.

"Je regarde souvent des comédies musicales en ligne", confie ce spectateur à l'AFP.

"Des comédies musicales françaises", tient-il à préciser.

Le Broadway à la française touche parfois une corde sensible dans un pays communiste qui se voit volontiers comme l'héritier de la Commune de Paris.

"Les spectacles français (...) sont généralement des adaptations de chefs-d'oeuvre ou d'événements historiques et ils reflètent l'intensité des luttes sociales", à l'image de «1789, les amants de la Bastille»", relève Wang Ruiqi, une étudiante qui sort elle aussi du spectacle.

Exprimer des émotions à travers la musique est une marque de fabrique pour les spectacles français, veut croire Yu Xinyue, qui produit en Chine "Le Rouge et le Noir".

A l'inverse, "les spectacles à l'anglo-saxonne accordent davantage d'importance à l'aspect dramatique et à la façon de raconter des histoires". Résultat, certaines blagues ou références culturelles peuvent être difficiles à adapter dans une autre langue, explique Mme Yu.

A Pékin, la salle ne comprend pas forcément le français, loin de là, mais le public, majoritairement jeune et féminin, reprend en choeur les chansons phares du spectacle. Et il s'extasie devant Côme, révélé en France par le télécrochet "The Voice", qui campe Julien Sorel, le héros du roman.

"C'est très drôle, parce qu'il y a 15 ans, (le public chinois) était complètement différent", se souvient Laurent Bàn, qui connaît bien le pays pour l'avoir sillonné avec "Notre-Dame de Paris" et "Mozart, l'opéra rock".

"Au départ, les salles étaient très calmes" et le public assistait "de manière très très polie" aux spectacles.

Aujourd'hui, "il se lâche vraiment et exprime ses émotions (...) c'est une folie ambiante", assure M. Bàn.

"Mais sans jamais franchir cette limite qui pourrait nous mettre mal à l'aise", tempère Côme, tout surpris de s'être fait offrir une pédale de guitare avant sa rencontre avec l'AFP.

Dans un pays féru de littérature française, "Notre-Dame de Paris" a fait salles combles l'été dernier, au moment où l'incendie du monument parisien était dans tous les esprits.

Le spectacle créé par Luc Plamondon et Richard Cocciante à partir du roman de Victor Hugo a été l'une des toutes premières comédies musicales françaises à être jouée en Chine dès 2002.

Dans un pays avide de nouveautés et qui a vu sa population gagner en pouvoir d'achat, le succès a fait des émules.

"Les comédies musicales françaises sont parfaitement adaptées pour le public", assure Yu Xinyue.

Le géant asiatique a une longue tradition de mise en scène avec différentes formes de théâtre-opéra.

Mais les comédies musicales "s'adressent au grand public et pas aux initiés qui ont l'habitude d'aller au théâtre", fait-elle remarquer. Selon Mme Yu, il y a également un savoir-faire des producteurs français qui, souvent "issus du show-business", savent "rendre populaires" les spectacles.

A l'exemple d'Albert Cohen, ancien homme de radio et producteur de télévision et de cinéma, qui a signé "le Rouge et le Noir", "Les Dix commandements", "Le Roi soleil" et "Mozart, l'opéra rock".

Le public connaît "les paroles de chaque chanson mais aussi la mise en scène. Il arrive qu'on me dise: «Tu as changé un truc là!». Ils regardent les détails, tout est précis", sourit Laurent Bàn.

Le 08/11/2019 à 09h01