Bachir Demnati au Comptoir des Mines: Quand l’(IN) attendu crée l’inédit

L'artiste Bachir Demnati, deuxième rangée, troisième à partir de la gauche 

L'artiste Bachir Demnati, deuxième rangée, troisième à partir de la gauche  . DR

La galerie «Le Comptoir des Mines» à Marrakech abrite une belle exposition de Bachir Demnati jusqu’au 10 décembre. Cet artiste peu connu de nos jours a pourtant contribué à l’aura du mouvement plastique des années 70 au Maroc.

Le 24/10/2018 à 08h09

Bachir Demnati. Ce nom ne vous dit rien? La galerie du Comptoir des Mines de Marrakech vous propose ainsi de découvrir un artiste qui a pourtant été un pilier important du mouvement des années 70 au Maroc. 

© Copyright : DR

40 ans après son terrible accident survenu à proximité de Marrakech en 1978, l’éloignant de la scène artistique marocaine, Le Comptoir des Mines Galerie le présente de nouveau aux amateurs d’art. «À la suite d’une série d’événements entre 2015 et 2016, nous avons pris connaissance du destin peu ordinaire de cet artiste et nous avons entamé une série de discussions pour le convaincre de présenter son travail de nouveau. Nous trouvions sa trace dans de nombreux catalogues d’expositions antérieurs à 1978 et ensuite plus rien, comme s’il avait été effacé volontairement de l’histoire des arts plastiques marocains» déclare Hicham Daoudi fondateur du Comptoir des Mines.

© Copyright : DR

Membre fondateur de l’Association Marocaine des Arts Plastiques (AMAP) en 1972, Bachir Demnati avait pris part à un ensemble de manifestations collectives tout au long des années 70, aux côtés d’illustres artistes marocains qui lui ont permis de gagner une reconnaissance certaine à cette époque.

© Copyright : DR

À la suite de son accident à Marrakech, il décida de se consacrer pleinement à sa seconde activité d’architecture d’intérieur à Tanger où il participa à la réalisation de grands projets hôteliers. Naissance d’une vocation: né en 1946 à Tanger, Bachir Demnati est très vite interpellé par la vie artistique en rencontrant, très jeune, des artistes européens qui peignaient sa ville. Agé de 10 ans, il réalisera des graphismes pour son équipe de Football «El Alam» et suivra des cours d’art plastique prodigués par Henri Moie au lycée Ibn El Khatib. En 1964 son père décède et il décide à l’âge de 17 ans de réaliser des commandes artistiques pour des hôtels de la ville.

© Copyright : DR

Bachir Demnati apparaît réellement dans le paysage artistique marocain en 1965, à l’occasion de sa première exposition individuelle au Casino de Tanger soutenue par l’association des anciens élèves du Lycée Ibn El Khatib, alors qu’il est encore élève de terminal. Grâce à cet événement, il bénéficie d’une bourse d’excellence attribuée par l’ONU, qui lui permettra d’étudier en Belgique où il séjournera entre 1965 et 1969, pour étudier à l’Ecole Supérieure des Arts Visuels de Bruxelles communément appelé La Cambre. Il suivra particulièrement l’enseignement de Christophe Gevers qui l’incitera à toujours exploiter et travailler de nouveaux matériaux.

De retour au Maroc, il tente de mener de front son activité artistique avec celle de directeur des ateliers de production au sein du fameux cabinet d’architecture Guy Stenier, en 1969. Au bout de quelques mois et pendant qu’il préparait sa grande exposition personnelle au Casino municipal de Tanger pour le mois de Novembre, des événements dramatiques vont précipiter le cours de sa vie. Guy Stenier décède dans le crash d’un vol intérieur marocain au départ d’Agadir, laissant le cabinet orphelin. Le jeune Bachir et un autre collègue Belge décident de reprendre la direction du Cabinet qui se nommera désormais «Ghesquiere-Demnati».

Le 18 Janvier 1970, il exposera enfin au Casino Municipal de La ville sous le «patronage» de Son Altesse la princesse Lalla Fatima Zohra et du gouverneur de la ville le commandant Hosni Benslimane. Ses œuvres interpelleront très vite le public qui découvrira des œuvres aux graphismes saisissants, bien éloignées des matériaux en vue à cette époque. La scène marocaine ne tarde pas à le solliciter à travers Mohamed Melehi qui l’invite à venir enseigner à l’école des Beaux-arts de Casablanca.

Ne pouvant délaisser son entreprise d’architecture, il ne peut rejoindre le groupe de Casablanca, mais s’associe à l’idéologie de ce mouvement. 

En 1975 à Tanger, il accueille Melehi et Chabâa pour une exposition majeure dans son espace «la Galerie Cotta».

Les archives de ce moment témoignent de la qualité des recherches menées par les 3 artistes qui ont des liens évidents entre eux. Bachir Demnati est à ce moment-là une des figures importantes de la scène plastique marocaine.

Par Khalil Ibrahimi
Le 24/10/2018 à 08h09