“Tu n’as rien compris à Godard”

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ChroniqueLe titre de cette chronique est inspiré de celui d’un recueil de nouvelles de mon collègue et néanmoins ami Fouad Laroui lequel, comme chacun sait, sévit pas très loin d’ici pour ne pas dire juste à côté.

Le 14/03/2017 à 11h59

Comme j’aime bien rendre à Jules ce qui appartient à César -même si, je vous le jure, je n’ai jamais rien emprunté ni à l’un ni à l’autre- je dois vous préciser que le titre de cette chronique est inspiré de celui d’un recueil de nouvelles* de mon collègue et néanmoins ami Fouad Laroui lequel, comme chacun sait, sévit pas très loin d’ici pour ne pas dire juste à côté. 

Justement, en parlant de Fouad Laroui - quelle belle transition ! - je viens de passer plus d’une semaine en sa compagnie à Tanger, ville où il a présidé le Jury de la 18ème édition du Festival National du film. D’ailleurs, on l’appelle désormais “Monsieur Le Président”, fonction qui est venue s’ajouter à la longue liste de ses autres fonctions qui ne sont pas, vous vous en doutez bien, toutes juste honorifiques et éphémères.

Ceci dit, si je dois avouer que je l’ai un peu envié au début ne serait-ce que pour la superbe limousine qu’on a mise à sa disposition et pour le nombreux personnel qu’on a mis à son service, j’ai commencé très vite à le plaindre quand j’ai commencé à voir les films dont il avait, lui et les pauvres autres membres de son jury, la charge lourde et ingrate de juger. 

Comme je lui ai soufflé un matin à l’oreille au détour d’un couloir de l’hôtel où nous avions séjourné ensemble, contrairement à lui, moi je n’étais pas obligé de voir tous les films, et je pouvais même quitter la salle en pleine projection quand un de ces films ne me plaisait pas, ce qui m’est arrivé plus d’une fois, même si je ne suis pas sorti à chaque fois.

Je pense que vous avez déjà deviné que je n’ai pas été particulièrement satisfait de la sélection de cette année. Je pourrais même vous dire que mises à part deux ou trois jolies révélations et une ou deux timides confirmations, la plupart des oeuvres qui ont été présentées étaient bien en deçà de ce qu’on pouvait légitimement espérer d’un jeune cinéma national vieux quand même de presque 50 ans.

A ce propos, je crois que vous vous rappelez bien de la vive polémique qui avait surgi à la dernière édition du Festival International de Marrakech quand aucun film marocain n’avait été retenu pour la compétition. Or, au lieu que nos cinéastes profitent de cette si malheureuse et en même temps si normale décision décident de se remettre en cause et essayent de chercher le pourquoi du non-décollage de notre industrie cinématographique, ils ont préféré mettre à l’index “les responsables” les accusant de tous les maux, comme si ces “responsables” étaient responsables des failles de leurs scénarios ou bien des faiblesses de leur réalisation ou bien des défaillances de leur production, ou bien des trois à la fois.

Maintenant, revenons au dernier Festival de Tanger et à son généreux palmarès qui a permis à la majorité des films en compétition d’être consacrés, au grand bonheur de certains primés qui n’en croyaient pas leurs trophées, et au grand malheur d’une partie du public déprimé qui n’en croyait pas ses oreilles. 

Et en parlant d’oreilles, j’allais oublier de vous rapporter que notre Fouad Laroui international a attrapé une vilaine conjonctivite juste à la veille de la dernière journée de projection. De là à en déduire que les films en compétition y sont pour quelque chose, c’est un pas que bon nombre de festivaliers a délibérément et impunément franchi, et chose que mon éducation pudibonde ne me permet pas de faire même avec toute la mauvaise foi du monde.

Tout en souhaitant à mon ami et néanmoins collègue Fouad Laroui de retrouver très bientôt son regard vif et perçant et sa plume acerbe et percutante, je n’ai plus qu’à vous dire vivement un cinéma national à la hauteur de nos attentes et de notre intelligence.

Et vivement mardi prochain.

* Le titre exact de ce recueil paru chez Julliard en 2004 est : “Tu n’as rien compris à Hassan II”. En lisant la nouvelle qui porte le même titre, on apprend que c’est Mohamed Berrada, le célèbre journaliste qu’on ne représente plus, qui avait lancé un jour cette phrase à Fouad Laroui, alors qu’ils prenaient un verre dans un bar quelque part à Paris.

Par Mohamed Laroussi
Le 14/03/2017 à 11h59