Maître stagiaire sur un arbre péché…

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ChroniqueJe sais que la politique consiste à promettre la lune et le lendemain vous donner des coups qui vous font voir des étoiles en plein jour. Justement, à propos de coups, je voudrais revenir à ceux qui ont été reçus par certains jeunes que nos confrères appellent joliment «Les professeurs de demain».

Le 26/01/2016 à 14h14

Depuis que j’étais tout petit, donc ça ne date pas d’hier, j’ai toujours adoré les fables, surtout celles qui se terminent bien, autrement dit avec la fin que j’attends. J’adore les fables, mais je n’aime pas du tout les fabulateurs et encore moins les affabulateurs. Je ne vais pas vous jouer l’érudit que je prétends être, mais permettez-moi de vous expliquer la différence entre un fabulateur et un affabulateur. Ce sont des mots qui, apparemment, se ressemblent comme deux gouttes d’eau, mais ce sont des gouttes d’eau qui ne se ressemblent pas vraiment.

D’ailleurs, au masculin ou au féminin, ce n’est pas kif-kif. En effet, une femme qui fabule ou qui affabule, c’est quand même plus sympa que quand c’est un mec qui le fait. Avec une femme, on a au moins l’illusion qu’elle le fait pour vous séduire, mais ça, c’est une autre histoire. Revenons à mon explication. En gros, si je devais résumer au strict minimum, fabuler ça serait un peu raconter n’importe quoi à quelqu’un, et affabuler, c’est exactement la même chose, sauf que la personne qui le fait vous prend pour un parfait imbécile. D’ailleurs, on peut parfaitement fabuler tout seul, s’inventer des histoires, histoire de rêver un peu ; par contre, pour affabuler, il faut obligatoirement avoir quelqu’un en face de soi, une victime, quoi. Voilà. Mon explication est finie. Je ne suis pas très sûr d’avoir été clair, mais au fond, ce n’est pas tout à fait de ça que je voulais vous parler. Ou plutôt si.

En vérité, ces derniers temps, je suis consterné, je suis abasourdi, je suis atterré, je suis ahuri - et je peux continuer comme ça pendant des heures - bref, je suis sidéré par les propos que j’entends ça et là par certains de nos grands responsables et non des moindres. Oui, bien sûr, je ne suis pas naïf, et je sais que la politique consiste souvent à dire n’importe quoi, prétendre la chose et son contraire, et même vous promettre la lune et le lendemain vous donner des coups qui vous font voir des étoiles en plein jour. Justement, à propos de coups, je voudrais, si vous me le permettez, revenir à ceux qui ont été reçus par certains jeunes que nos confrères francophones appellent très joliment «Les professeurs de demain».

Pour ne rien vous cacher, j’ai eu beau suivre tout ce qui a été écrit, dit et diffusé sur cette triste affaire, honnêtement je suis incapable de vous dire si ces malheureux - je parle bien entendu des futurs ex-profs et pas de ceux qui les ont tabassés ou ordonné de le faire – ont raison de râler comme ils l’ont fait et continuent de le faire. Par contre, après avoir entendu un ministre plutôt costaud raconter devant quelques dizaines d’honorables élus et en même temps devant plusieurs millions de non moins honorables citoyens, que «les forces de l’ordre» sont intervenues sur son ordre mais avec l’accord de son patron, et quelques minutes après, c’est ce même patron qui jure devant Dieu qu’il n’était pas au courant, je me dis qu’il y a comme qui dirait désordre. Car qui croire?

Théoriquement, et pour des raisons mystico-religieuses, quelqu’un qui dirige le Premier Parti Musulman (PPM, c’est pas mal non plus, hein ?) ne pourrait pas mentir d’une manière aussi éhontée et encore moins devant ses propres électeurs et ses propres fidèles. D’abord, c’est un péché mortel et on promet l’enfer pour beaucoup moins que ça. Et puis, ça ne fait pas très sérieux de crier sur tous les toits qu’on est le plus grand boss élu de toute l’histoire de la jeune démocratie marocaine et tout et tout, et avouer que ce sont d’autres qui prennent les vraies décisions et que «ce n’est pas si grave que ça». Je suis mal placé pour lui donner des conseils, mais je pense que s’il continue de nous raconter à chaque fois qu’il n’était pas au courant, mais qu’il assume quand même, on va finir par le prendre tout simplement pour un fabulateur ou pire, pour un affabulateur, puisque maintenant, vous connaissez la différence. Alors, franchement, vivement qu’il nous prouve que c’est lui le vrai patron. Et vivement Mardi prochain.

Par Mohamed Laroussi
Le 26/01/2016 à 14h14