Gaza: A Armes Inégales
Par Tahar Ben Jelloun (@Tahar_B_Jelloun) le 14/07/2014 à 14h00
Les Palestiniens n’ont pas de chance. Ils doivent se battre contre l’ennemi le plus puissant, le plus fort et le plus soutenu dans le monde. En plus ils n’ont pas de chance d’avoir un parti religieux qui représente une partie du peuple.
Cela fait une semaine que chaque jour j’essaie d’écrire quelque chose sur ce qui se passe à Gaza. Je suis révolté, meurtri et incapable d’aligner des phrases d’indignation ou de colère. Je sais, ça ne sert à rien. Les Palestiniens n’ont pas de chance. Ils doivent se battre contre l’ennemi le plus puissant, le plus fort et le plus soutenu dans le monde. En plus ils n’ont pas de chance d’avoir un parti religieux qui représente une partie du peuple. Le Hamas et sa politique de refus systématique de négocier sont une aubaine pour Israël. L’Autorité palestinienne a tant cédé sur plusieurs plans au point d’apparaître faible et sans effet. D’ailleurs, Netanyahu la méprise et ne cesse de développer les colonies. Il a décidé en plus de construire un nouveau mur pour la sécurité d’Israël.
Cet Etat est le seul au monde à n’avoir jamais respecté les dizaines et dizaines de résolutions des Nations Unies. Impuni et arrogant, il poursuit le vol et l’occupation des territoires et bombarde les populations à Gaza. Les roquettes que le Hamas lance sur le sud d’Israël provoquent plus de peur que de mal ; ça maintient le sentiment d’insécurité qui justifie les représailles les plus meurtrières. Si le Hamas avait un peu de bon sens, il cesserait ces tirs, car ça ne sert qu’à donner à son ennemi la possibilité de massacrer les civils.
Les Palestiniens sont abandonnés. Ils meurent et on doit se taire. C’est ainsi. Le fait que le premier ministre israélien ait reçu dès le départ un soutien fort et ferme de François Hollande ainsi que d’Angela Merkel est en soi un "permis à tuer", compte tenu de la politique intransigeante de Netanyahu. C’est la première fois que la présidence de la république française publie un communiqué aussi partial et unilatéral sans la moindre référence aux victimes civiles palestiniennes. Même si l’Elysée a essayé de rétablir un petit équilibre, il n’en reste pas moins que la France a manqué d’esprit de justice. Les Arabes, surtout ceux qui sont riches auraient dû réagir et informer M. Hollande que cette attitude lui couterait cher. Angela Merkel ne peut qu’être aux côtés d’Israël ; l’histoire lui interdit la moindre empathie avec un peuple occupé et humilié en permanence. Mais la France, et surtout François Hollande, a perdu une occasion d’être juste. On ne lui demande pas d’approuver tout ce que font les Palestiniens ni de les aimer, ni de les comprendre ; on lui demande de faire preuve d’intelligence politique. Si les Arabes étaient unis, s’ils soutenaient le peuple palestinien avec autant de force et de conviction que les Occidentaux soutiennent Israël, on n’en serait pas là. Plus de 900 raids de l’armée israélienne contre la population civile. 200 tués et des centaines de blessés et ça continue. Ce n’est pas la première fois que ça arrive. En 2006 Israël a envahi le Liban et a tué plus de 3000 civils. Impuni. Les résolutions des Nations Unies ? Il les foule aux pieds. Israël peut tout se permettre surtout quand il a face à lui une bande de radicaux qui n’ont aucun sens de la stratégie politique.
Comme dans une fatalité où la tragédie fabrique l’histoire, nous assistons impuissants et meurtris à cette guerre du plus fort contre le plus faible. Il est évident que l’enlèvement puis l’assassinat de trois jeunes israéliens a été un malheur et une erreur grave. La réponse d’individus aussi méprisables que les premiers a été aussi catastrophique : brûler vif un adolescent n’allait pas ramener à la vie les malheureux israéliens. On aurait pu en rester là. Mais l’Etat d’Israël ne l’entend pas ainsi : il faut des représailles de grande envergure, il faut tuer des familles, détruire des maisons et démontrer pour la énième fois qu’Israël est puissant, fort et impitoyable.
Cette chronique est inutile. Elle ne servira à rien. Les mots glissent et n’apporteront aucune solution au problème. Il fut un temps où l’on croyait que s’indigner et dénoncer pouvaient changer le cours des choses. Cette époque est révolue. On se bat aujourd’hui à "armes inégales" et on applaudit le plus fort. Si vous en doutez, lisez la presse occidentale.