Y a-t-il quelqu’un qui connaît quelqu’un?

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ChroniqueVous devez connaître quelqu’un qui connaît quelqu’un, et vous devez le faire savoir à l’employé qui vous fait face. Sinon vous n’obtiendrez rien.

Le 03/10/2020 à 09h00

Quelle est la première chose à faire quand on a un problème avec la police? Un problème de santé? Une question à régler auprès d’une administration?

Tous les Marocains connaissent la réponse: il faut appeler quelqu’un qui connaît quelqu’un! Cet oiseau rare aura le don de vous faciliter la tâche, de vous sortir du pétrin. Plus généralement, il fera en sorte que vous soyez reçu avec le sourire, écouté, respecté. En bref: que vous soyez traité comme un être humain!

Remarquez, toutes ces choses énumérées, tous ces «services», ne coûtent strictement rien. Etre reçu poliment, trouver quelqu’un qui écoute vos doléances sans se curer les narines ou les oreilles, ne pas être traité comme un chien, c’est le b.a.-ba de l’accueil que n’importe quelle administration est censée réserver au citoyen. Même (et surtout) à l’intérieur d’un commissariat de police. Dans un hôpital public ou une clinique. Au fin fond d’un service des mines perdu au milieu d’une décharge. Au service des impôts, du cadastre, de l’hygiène, de l’état civil, etc.

Tous ces endroits dans lesquels on n’atterrit pas de bon cœur mais où on «échoue» ont besoin d’un brin d’humanité, de normalité. Mais il n’y a rien à faire. Vous devez connaître quelqu’un qui connaît quelqu’un. Vous devez le faire savoir à l’employé qui vous fait face pour gagner son respect. Vous devez l’intimider, lui en imposer. Sinon vous n’obtiendrez rien.

Qu’elle soit publique ou privée, l’administration marocaine a gardé la même mentalité du temps des «indigènes». Les employés sont fâchés avec le sourire, la politesse, et surtout avec l’amour de leur métier.

Alors ils font la gueule et ils sont continuellement débordés, irrités, occupés, désagréables. 

En face d’eux, monsieur tout le monde n’a droit à rien. Son temps n’est pas précieux, il est fait pour attendre et être reçu n’importe comment. C’est ce qu’il mérite. Et ne vous inquiétez pas pour lui, il ne se rend compte de rien… 

On dit que pour vivre heureux, il faut connaître quelqu’un qui connaît quelqu’un dans toutes les administrations, les établissements et les services qui comptent. Il vous faut ce «réseau» pour parer à toutes les situations. C’est aussi précieux qu’une assurance tous risques.

Quant à celui qui ne connaît personne, il n’a rien. C’est ce qu’on dit. Alors bon courage à lui…

Le véritable défi de développement qui attend notre société est peut-être là, dans ce nœud gordien qui s’appelle l’humanisation de son administration. Ça s’apprend. Enfin, il faut espérer…

Par Karim Boukhari
Le 03/10/2020 à 09h00